Nous ne connaissons
pas le nom du maître d'oeuvre qui dès les premières années du XIII ème siècle
osa jeter pour la première fois à une telle hauteur des voûtes sur croisées
d'ogives, cela malgré l'existence de la crypte qui, en imposant les points
d'appuis, donnait à la nef une largeur exceptionnelle de 16m 40. Le maître de
Chartres innove prudemment. Dans l'élévation, le triforium remplace les
tribunes. Les fenêtres hautes chassent le mur., cédant la place aux vitraux. La
cathédrale de Chartres devient le premier édifice de très grande dimension dont
il fut décidé que tout le système de structure assurant sa stabilité reposerait
sur l'emploi d'arcs boutants. De massives culées taillées en ressaut, canalisent
les poussées de la voûte. De tout son poids, celle-ci peut alors s'élever à 37m
50 au-dessus de la plus large des nefs de cathédrale gothique. Cet édifice de
pierre, dont tous les éléments d'architecture servent à conduire les forces vers
le sol, nous attire irrésistiblement vers le haut, là où s'épanouissent dans la
légèreté de la voûte, les piliers et les colonnes. Rien dans cet ensemble n'est
gratuit. Toutes les lignes sont nécessité de construction. La décoration,
elle-même, très sobre, révèle et souligne l'architecture. Nécessité qui est
beauté.
Il faut parcourir
lentement la nef ou l'un des bas-côtés pour en apprécier la santé robuste,
l'immensité du vaisseau, l'élan puissant des piliers de la nef solidement
amarrés au dallage le rythme cadencé des piles tantôt cylindriques, tantôt
octogonales, le mouvement ascensionnel des quatre gerbes de colonnes à la
croisée du transept, l'admirable harmonie des proportions.
Il faut sortir aussi pour admirer l'alliance
formidable de la puissance et de la légèreté dans la double volée
d'arcs-boutants du chevet. Savoir toujours passer du dedans au dehors, du dehors
au-dedans et, ici, demeurer pour découvrir dans la pénombre, la lumière écrivant
les formes et dessinant sans cesse les volumes.
Copyright © Paul Mollé - 01/01/1999
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